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Les aubergines à la tomate…

Déjà, depuis la veille au soir, tout était prêt.

Tomates et aubergines étaient là, trônant sur la table de la cuisine, en rouge et noir. Maman les avaient sorties avant d’aller se coucher. Elle  choisissait les aubergines plutôt longues, les plus droites possible, avec la peau brillante, luisante, douce, glissante comme une toile cirée, marron foncé. – Certaines cuisinières les prenaient grosses et rondes, mais maman désapprouvait ce choix, argumentant  qu’ainsi elles auraient bien trop de graines à l’intérieur et présenteraient des trous. -

Les tomates, pour la sauce, étaient bien mûres, bien grasses, bien épaisses, rouge vermillon carmin. Déjà lavées.

Dés le matin, branle bas de combat. Sitôt le déjeuner pris, maman enfilait le tablier blanc, le même que celui pour faire les « oreillettes », avec les bretelles croisées derrière le dos, et noué par devant…Puis elle sortait les « économes » couteaux éplucheurs et nous disait : « Allez les enfants, on épluche ! » Et la cérémonie commençait.

Il fallait d’abord couper la tête des aubergines, la partie piquante, qui ressemblait un peu à une énorme araignée. Un monstre vert en miniature. Puis laisser glisser l’économe le long de la peau. Apparaissait alors la chair vert tendre, presque blanche. Malheureusement, au contact de l’air, elle fonçait, noircissait, devenait marron jaunâtre. Il fallait donc opérer vite. Maman se réservait la coupe. Opération délicate, car il fallait fendre les aubergines dans le sens de la longueur, de haut en bas, en tranches le plus fines possible sans trop, et les plus régulières possible, et ce sans que le couteau dévie, ripe en chemin et risque de déchirer la tranche en deux avant la fin. La difficulté était le début et la fin de l’aubergine, là où les tranches étaient plus petites, moins longues, et à cause de l’arrondi inévitable.

- Certaines familles coupaient les aubergines en petits dés. Mais Maman méprisait cette technique. -

Pendant ce temps, nous les enfants, nous avions coupé les tomates en quatre, en évidant soigneusement les graines. Le timing et la synchronisation entre ces diverses opérations préparatoires à la cuisson étaient très importants. Car, si l’on tardait trop, les tranches d’aubergines noircissaient. Maman  plaçait les tomates dans un faitou, avec de l’huile d’olive et de l’ail coupé en minuscules petits cubes, et bien sûr sel et poivre. Elle ajoutait quelques morceaux de sucre pour éviter l’acidité.

- Une autre tradition pour la sauce tomate était de cuire les tomates sans ail mais avec thym et laurier. Maman reconnaissait cette façon de faire qui avait été celle de sa mère, mais préférait de loin la sienne, moins raffinée, mais plus sobre. -

Une autre difficulté était de savoir exactement à quel moment mettre la poêle à chauffer. Pas trop tôt pour ne pas enfumer la cuisine avec l’huile trop chaude, pas trop tard, pour ne pas avoir à attendre avant la cuisson. Une fois, l’huile à la bonne température, Maman sortait la fourchette à aubergine, une petite fourchette aux dents très pointues pour pouvoir piquer aisément les tranches. Et l’opération commençait.

L’opération avait lieu au mois d’Août, car avant cette date, à l’époque dont je parle, aubergines et tomates n’étaient pas assez mûres.

- Actuellement, grâce à des subterfuges techniques, on trouve dans le commerce des aubergines des le mois d’avril et des tomates (comme des fraises) tout au long de l’année. Tomates ou fraises qui ne savent pas ce que c’est que la terre, ou le soleil. Elles ont l’allure et parfois le goût des tomates et des fraises…Mais en ont-elles les vertus ? Ne dit-on pas que ce qui est bon pour la santé, ce sont les fruits et légumes de saison et de proximité. Avons-nous vraiment besoin d’importer des roses du Kenya ? Et sans vouloir passer pour une vieille réac Poujadiste n’y a-t-il pas de rosiers chez nous, dans notre bonne terre de France ?- Fin de la digression ! -

Trois heures devant les fourneaux en plein été…Ce n’était pas une partie de plaisir ! Et là, il ne fallait pas traîner dans les jambes de Maman, ou bien faire des bêtises. Ce n’était pas le moment de se faire remarquer. Car elle était indisponible ! Trop concentrée à gérer la température et le niveau de l’huile dans la poêle. Pas assez d’huile et trop chaude, donnait des aubergines cuites irrégulièrement. rabinées par endroit, sèches et cassantes, pas assez cuites à d’autre et toutes gondolées ! Horreur et déshonneur ! Les tranches devaient impérativement continuer à être régulières, plates et entières.

Opération d’autant plus périlleuse à l’époque des fourneaux à bois ou à charbon, au feu difficile à maintenir constant. J’ai des souvenirs, un peu flous certes, mais réels  de cette époque là. Ma grand-mère ou ma mère, plantées devant les fourneaux, rouges et en sueur. La cuisine enfumée….L’arrivée des cuisinières à gaz dans les maisons a contribué grandement à soulager les mères de famille. Et l’opération de « mission quasi impossible » réservée à une élite de femmes initiées, expertes grâce à une expérience transmise de génération en génération, de mère à fille, s’est est vulgarisée, popularisée, se mettant ainsi à la portée de toutes. Le progrès a quelque fois du bon !

Une autre difficulté : comment caser dans une poêle ronde des tranches droites ? Il fallait placer en premier les longues tranches bien droites, plus grandes et plus longues à cuire et compléter dans les coins avec les tranches plus petites et les morceaux de début et de fin. Plus quelques « ratées » inévitables, victimes d’une glissade intempestive du couteau maternel.

Les aubergines cuites correctement étaient empilées dans un grand plat, une rangée dans le sens de la longueur et par dessus une rangée perpendiculaire, aussi soigneusement que s’il s’agissait de repriser une chaussette.

De nos jours, où l’on est sensible à sa ligne et à la santé de ses artères, on utilise parfois un passage intermédiaire sur du Sopalin pour laisser égoutter l’huile. A l’époque dont je parle, on ne s’en souciait guère. Les aubergines devaient baigner dans l’huile !

Elles étaient toujours bien meilleures le soir ou le lendemain « A se lever la nuit pour en manger ! »

Curieusement, Papa était toujours absent dans ces moments. Je sais bien que les hommes doivent travailler à l’extérieur pour ramener de l’argent à la maison. Mais quand même…même en été…. je n’ai aucun souvenir de sa présence. Sans doute craignait-il de se faire espousser ! C’est vrai qu’il valait mieux ne pas traîner dans les jupes de Maman pendant la cuisson. Il n’apparaissait qu’au moment de les manger…Curieusement !

Dans mon petit jardin, c’est la guerre !

On pourrait s’y tromper. Tout a l’air, comme ça, calme, tranquille, serein. Le chat se chauffe au soleil. Un papillon voltige. Les mésanges pépient, voletant d’arbre en arbre. Une brise berce en silence les branches du laurier. Paresseusement, le figuier met ses feuilles. Les lys sortent de terre. Lavande, verveine, romarin, basilic, tout ce vert nous apaise, tout respire la paix…

Et pourtant c’est la guerre ! Penchez-vous au dessus, regardez un peu mieux. La timide pervenche attaque la pariétaire. Le liseron, si frêle, ligote, étrangle la violette. L’ipomée volubile enlace le rosier d’une étreinte mortelle. Le jasmin se faufile et l’air de rien colonise le lierre. Le troène, royal, se pousse et défie le mûrier. Face à face sanglant, suspens insoutenable : Qui des deux reculera ?

Ce qui se trame en dessous n’est guère plus élégant. L’acanthe, comme une pieuvre, lance ses racines à l’assaut du sous sol. Les belles de nuit, s’enfouissant toujours plus profond, années après années, envahissent l’espace. Et les lilas têtus repoussent ça et là…

La bataille fait rage, silencieuse, sournoise. On gagne du terrain, on perd des territoires. Les vaincus se replient, jaunissent, se dessèchent. Pas de cris, pas de sang, c’est propre, sans appel ! La lutte, le bras de fer, n’auront jamais de fin. C’est comme la guerre d’Irlande, les vendettas corses, Palestine et Israël! Pas de cessez-le-feu, d’armistice, de trêve. Hier c’était Austerlitz, mais viendra Waterloo. Tout dépend du son de cloche qu’on écoute, par quel bout de la lorgnette on regarde, et à quel moment on arrête l’histoire. Le vaincu d’aujourd’hui sera peut-être vainqueur demain… Le combat ne s’arrêtera qu’avec la fin du monde. La mort du dernier partisan n’y suffirait pas. Il y  aura toujours, quelque part dans le monde, un arrière petit cousin prêt à se réveiller un jour persuadé qu’il est vital pour lui de venger la mort de son aïeul. La haine est toujours prompte à renaître des décombres, le feu couve sous la cendre, l’orage n’est jamais très loin. Le temps seul jugera…

Et moi, je joue à Dieu ! Je plante, j’arrache, je sème. Je bouture, je taille ! Peine perdue, illusion vaine ! Comme la marée emporte les châteaux de sable, les années peu à peu anéantiront mes efforts de « simple mortelle ». La nature reprend toujours ses droits…Non ! Nature n’est pas «un temple…». Nature est une jungle où on ne fait pas dans la dentelle, où tous les coups sont permis. Sans états d’âme, sans pitié. Rien de personnel : « Just business ! »

Pourquoi vouloir de l’homme qu’il soit plus raisonnable ? Parce qu’il a un cerveau ? Qu’il opère à cœur ouvert, a inventé la roue et guérit le cancer ?  Pfttt ! Il a aussi un égo qu’il lui bouche la vue, le fait voir à court terme, et de façon étroite. Plongé dans la contemplation de son nombril, il détourne les eaux, goudronne les chemins, coupe les pins centenaires autour de sa piscine et, comble de l’horreur – Ô honte, ô barbarie – assassine les journalistes, croyant tuer la liberté!

L’honneur de mon grand-père.

Mon grand-père maternel s’appelait Jules. Jules Louche. Si je révèle son nom de famille c’est parce que c’est important pour la suite. Car cette histoire n’est pas une fiction, c’est une histoire vraie.

Mes grands-parents étaient viticulteurs, vignerons. Ils habitaient une grande maison – bien sûr vigneronne – à deux étages. Sous le toit de la maison d’habitation, il y avait des greniers remplis de « merveilles » déposées là par les générations précédentes. Véritables cavernes d’Ami Baba, îles mystérieuses, paradis pour nos jeux d’enfants. Il y avait tout ce qu’il fallait pour ça. De grandes malles remplies de vêtements anciens, source inépuisable de déguisements, des jouets cassés, abimés ou simplement répudiés et oubliés, poupées, patins à roulettes, chevaux de bois, toutes choses qui ont fait les délices de mon enfance…Nous fûmes pirates, bohémiens, princesses, gladiateurs, indiens…Mais revenons à la maison !

Devant la maison d’habitation, une grande cour entourée de dépendances : Une écurie avec au dessus un immense grenier à foin. Je me souviens que pour donner à manger aux chevaux la nuit, mon grand-père avait bricolé un système ingénieux qui m’émerveillait : une ficelle était accrochée d’un côté à une trappe, de l’autre enroulée au remontoir de la sonnerie d’un gros réveil. Lorsque le réveil sonnait et que le remontoir en tournant déroulait la ficelle, la trappe s’ouvrait et déversait dans la mangeoire des chevaux la quantité de foin nécessaire, à l’heure désirée. Procédé technique rudimentaire mais efficace que n’aurait pas renié MacGyver ! La propriété comportait aussi une cave particulière, remplie de « foudres », ces énormes tonneaux dans lesquels on stockait le vin. Je me souviens du silence, un silence d’église, et de l’atmosphère tempérée et constante qui y régnait, comme dans les  grottes. Je me rappelle ma peur lorsque mon grand père m’y envoyait en mission pour remplir le carafon de vin. Je redoutais cette expédition, car la cave était sombre et, pour allumer la lumière, il fallait trouver à tâtons un petit interrupteur en porcelaine blanc qu’on devait tourner. Il ne fonctionnait pas très bien et on devait parfois s’y prendre à plusieurs reprises avant d’y voir quelque chose…Il y avait une « buanderie » avec un vrai lavoir… Un hangar sous lequel étaient entreposés charrettes, tombereaux, charrues… Je revois aussi la cuve dans laquelle les raisins étaient versés pendant la vendange, puis « trouillés » écrasés avec les pieds et où le moult fermentait… Le pressoir…

Mais cette histoire commence plus tôt, bien avant ma naissance.

Il y eut la guerre de 14/18. Mon grand-père avait fait les tranchées et n’en revint pas indemne. Pas de blessures physiques, mais des souvenirs qui le hantaient…Il n’en parlait jamais de cette guerre, mais je me rappelle que peu avant de mourir, les dernières nuits, il revoyait, revivait en rêve les combats, et on l’entendait hurler « Non, non ! Je ne veux pas mourir ». Mais je m’égare encore…Dans cette immense maison, pour des raisons économiques sans doute, un appartement indépendant avait été aménagé au premier étage, et était loué à une dame…dont j’ai oublié le nom. A son retour de la guerre, mon grand-père se mit à prendre l’habitude d’aller rendre visite à cette dame, la nuit, en cachette. Et, croyant naïvement passer ainsi inaperçu, il grimpait chez elle par le balcon en dressant une échelle contre le mur… Peine perdue, ma grand-mère, fine mouche, dotée d’antennes héritées sans doute de générations de femmes trompées par leurs époux, s’en aperçut et comme parade ne trouva rien de mieux que d’envoyer ma mère, en pleine nuit, retirer l’échelle ! Comment traumatiser ses enfants. Voile-toi la face Sigmund ! « Familles je vous hais » écrivait Gide ! Mon grand-père ne pouvait donc pas rentrer à la maison en catimini, mais se trouvait obligé de descendre par la rue et de sonner à la porte d’entrée pour qu’on lui ouvre. Je vous laisse imaginer le face à face entre l’épouse bafouée et le mari, penaud de s’être fait prendre, réintégrant le domicile conjugal la queue basse « jurant mais un peu tard qu’on ne l’y prendrait plus !»…

Les années passèrent. Ma mère épousa mon père, alla habiter un autre village, nous naquîmes mon frère et moi, nous fîmes des études, mon grand père mourut…et cetera, et cetera…A la mort de mon père, j’héritais de la maison familiale, une maison vigneronne elle-aussi, certes plus petite… Il y avait un petit jardin, entouré de murs très hauts. L’un d’eux donnait sur un très grand terrain appartenant à mes voisins. Quand j’étais petite ces voisins s’appelaient Dupré. Mais quelques années avant la mort de mon père, le terrain et la maison attenante avaient été vendus. Et les nouveaux propriétaires s’appelaient…Louche ! Comme mon grand-père ! J’ajoute ce détail juste pour ceux qui se seraient, d’aventure, un peu égarés ou endormis à la lecture de ce préambule.

Comme j’avais un jardin, je pris un chat ! Je l’appelais Jules, sans penser à mon grand-père, mais juste parce que ça m’amusait de pouvoir dire en le présentant: « Et voilà mon Jules ! » C’était un bébé chat, abandonné, qui avait été trouvé par des amis, dans le vide sanitaire de leur maison. Il vivait là avec ses deux soeurs quasiment à l’état sauvage. J’étais venue manger chez mes amis les mains vides, j’en suis repartie avec un chat ! C’était une petite merveille ! Tout noir avec une tache blanche sous le menton. Quand ils ont cet âge, on en prendrait une douzaine ! Bref, quelques mois passèrent….

Une nuit, vers quatre heures du matin, je suis réveillée par des miaulements déchirants. Je me lève et aperçois mon chat perché sur le mur des voisins. « Le pauvre ! Il a dû monter je ne sais par où, et maintenant il ne peut plus redescendre ! ». Vite, vite, tout émue, je vais chercher dans le garage ma grande échelle double. Il fait nuit, il fait froid,  l’échelle est lourde, je suis à moitié endormie, mais qu’importe, je vole au secours de mon chat. Je le ramène dans mes bras, le réconforte avec un gros câlin, quelques croquettes et je vais me recoucher. Quelques jours passent… A nouveau, en pleine nuit, miaulements désespérés. Je recommence l’opération, en maugréant quelque peu. « J’espère qu’il ne va pas me faire le coup chaque nuit ! Je l’aime mais quand même ! ». Et cette fois, curieusement, le chat se laisse plus difficilement attraper !… Une troisième fois, et là c’était en plein jour, miaulements déchirants, le chat sur le mur. Je vais chercher l’échelle, grimpe pour l’attraper. Pas moyen ! Comme je devais absolument sortir de chez moi pour aller en cours de yoga. J’abandonne. Je laisse le chat sur le mur, l’échelle dressée et je m’en vais, un peu en colère, je l’avoue. Quand je reviens une heure plus tard, le chat est couché sagement dans sa panière. Tout va bien. Je me dis : « Super ! Il a dû trouver un passage, par les toits et les rues avoisinantes. Il va pouvoir  désormais se débrouiller tout seul.» Je rentre l’échelle. Quatre heures du matin, rebelote !  Miaulements, chat sur le mur, transport d’échelle…Mais là Jules refuse carrément de se laisser attraper. Je vais me coucher vraiment en colère, en laissant l’échelle à sa place. Le lendemain matin, je trouve le chat dans sa panière…L’échelle est toujours contre le mur, et je ne sais pas pourquoi, je la laisse. Un peu plus tard j’aperçois mon chat, en train de monter par l’échelle pour atteindre le mur !

Et là, grande claque dans la gueule, tout me revient… mon grand-père… Jules. Jules Louche ! La locataire du premier étage, l’échelle, et ma mère sortant du lit en pleine nuit pour retirer l’échelle. Au secours Sigmund !  Mon chat Jules, tout chat qu’il était, m’avait fait comprendre qu’il voulait que je laisse l’échelle contre le mur ! Incroyable ! L’échelle demeura donc à cette place, et mon chat montait et descendait à son gré. Cela a duré des années et faisait l’étonnement et l’admiration de tous mes amis.

Mais, quand j’y repense, je ne peux m’empêcher de m’interroger : « Est-ce qu’à travers cet animal c’était mon grand-père Jules qui continuait à réclamer son échelle à ma grand-mère? » Est-ce possible ? Dites-moi si je délire ? Mais, quand même, par quelles voies mystérieuses, impénétrables et tortueuses, ce  chat s’était-il retrouvé à rejouer un événement passé, en une espèce de jeu de rôle ? Donnant une suite à cette histoire ? Me forçant à y participer et  à continuer un combat qui n’était pas le mien ? Comme pour réparer une injustice du passé ? (Je dis injustice, mais n’allez pas croire que je cautionne l’adultère…) Y a-t-il quelque chose à comprendre dans cette histoire? Y aurait-t-il un message pour moi ? Je ne le saurai, sans doute, jamais, mais j’aime à croire, qu’avec cette échelle, mon chat Jules, chat de gouttière, perdu et trouvé, a rendu à mon grand-père Jules sa liberté et son honneur !

 

Théâtre Nô

En 1994 le Festival d’Avignon était placé sous le signe du Japon, et je m’étais laissé entraîner par une amie à un spectacle de Nô qui avait lieu dans les carrières de Boulbon. J’y allais un peu « à reculons » car ce que j’avais pu entrevoir de ce genre de théâtre, par des films ou des documentaires, ne m’incitait guère à pousser plus loin l’expérience. J’avais catalogué cet art passéiste, obscur et ennuyeux. Et la perspective d’une soirée entière sur ce thème ne m’enthousiasmait guère. Mais, je n’avais rien d’autre à faire, et après une semaine passée à travailler entre quatre murs, j’aspirais vraiment à sortir de chez moi. De plus mon amie avait insisté avec des arguments de poids: « J’ai eu deux invitations par mon boulot ! Avant on se fait un petit restau. Nickel !…. Allez ! Je te prends chez toi et je te ramène ! » Je m’étais donc laissé faire.

Lorsque nous arrivâmes dans les carrières, le soir tombait. Le lieu était déjà grandiose par lui-même, mais les derniers rayons du soleil tombant sur les roches ajoutaient encore à son étrangeté et à son charme. De plus, le périmètre dédié au théâtre avait été aménagé dans un style « simili  japonais », gradins et bancs en bois, tissus peints, plantes vertes etc… et le dépaysement était complet. La soirée était en deux parties. En ouverture, un spectacle de Nô « moderne ». Abondamment relayé par les médias et objet de tous les commentaires, c’était l’évènement du festival. Personnellement, je n’en garde pas grand souvenir hormis celui d’un magnifique décor en bambous, de costumes blancs et noirs virevoltants, d’un nombre incroyable d’acteurs sur scène, de beaucoup de mouvement, chants, danse, musique… de beaucoup de  « bruit et de fureur ». Bref, cela glissa sur moi sans me toucher. Mon amie, non plus, n’était pas convaincue et j’espérais vaguement, à l’entracte, que cela la découragerait d’assister à la suite. Je me voyais déjà finir la soirée, confortablement installée dans mon fauteuil préféré, écoutant Madame Butterfly, en sirotant une tasse de thé sencha… pour rester dans la note ! Mais elle avait très envie d’assister à la deuxième partie : « C’est une pièce de Nô traditionnel, il faut absolument que tu vois ça ! » Je me tançais intérieurement: « Et voilà ! Tu le savais ! Tu aurais dû prendre ta voiture !  Au moins, tu  aurais pu t’échapper. Là, tu es obligée d’attendre que ça finisse ! »

Nous restâmes donc. L’entracte prit fin, le public regagna ses places. La nuit était alors complètement tombée. Les lumières s’éteignirent. Le noir se fit. Le plateau s’éclaira progressivement. Un plateau nu. Juste, en fond, une toile peinte représentant un arbre. Silence. Quatre musiciens en costume traditionnel entrèrent lentement sans un bruit, et s’agenouillèrent, en un mouvement souple. Les deux premiers tenaient à la main une sorte de pliant. Avec un ensemble parfait, une sorte de chorégraphie au ralenti, ils l’ouvrirent et s’y assirent, posant ensuite un petit tambour sur leurs cuisses. Pendant ce temps, les deux autres, l’un porteur d’une grosse percussion, l’autre d’une flûte, restaient à genoux parfaitement immobiles. Silence. Le temps semblait s’être arrêté. Alors, lentement le flûtiste éleva l’instrument à ses lèvres. Et dans la nuit, la flute commença à jouer… Aiguë,  incisive, stridente ! Les percussions répondirent…. Lentes, sèches, répétitives, obsédantes. Et puis une voix, des voix, un chant…Enfin un chant… des sortes d’onomatopées, gutturales, oscillant perpétuellement entre plainte et colère, supplique et menace, entre très grave et très aigu, un peu comme dans le yodle des bergers Tyroliens : yôôôôô……hou ! yôôôôô….hou ! – Tac ! (le premier petit tambour) – Toc ! (le deuxième), yôôôôôô….hou ! Yôôôôôô…hou ! – Pom ! (la grosse percussion) – hiiiiiiiiiiiii ! huuuuuuu ! Hiiiiiiiiiiiii ! huuuuuuu! ! (la flûte)… Je me souviens avoir pensé, atterrée : « Je ne tiendrai jamais jusqu’à la fin ! Je vais me mettre à hurler !» .

Et puis ce fut comme quand on s’endort…Vous savez ce moment très bref où l’esprit s’envole, décolle de votre réalité, part dans un ailleurs, dans une autre histoire, un autre monde. Et vous avec… (On perçoit ce moment fugitif dans les cas d’insomnies, car justement, après avoir décollé, on retombe lourdement et malheureusement sur terre, dans sa peau, dans sa tête, dans son lit ! Et, bien sûr, encore éveillé ! « Et zut, j’étais pourtant presque endormie ! ». Mais je m’égare…)

Une jeune fille masquée entra en scène, à petits pas, comme glissant sur le sol, légère, gracieuse, souple. C’était l’héroïne. Deux autres personnages la suivirent, sans doute, le père et l’amoureux ou quelque chose dans ce genre. (Je n’ai gardé aucun souvenir de l’histoire !). Mais aucune importance !  La jeune fille dansait, parlait, riait,  pleurait, souffrait, mourait…Sans un mot, sans un son ! Mais tout était là. Parfaitement intelligible, émouvant… Beau ! J’étais comme hypnotisée ! Oublié le lieu, les gens autour de moi, les bancs en bois sans dossier, la fraîcheur qui tombait sur les carrières… J’étais sortie de mon corps ! Et cette musique que j’avais d’abord trouvée insupportable, m’emportait, me « transportait » ! Un moment du pur bonheur, de « ravissement » au sens magique du terme. Je ne revins sur terre qu’au moment des saluts. Et ma surprise fut à son comble lorsque la ravissante jeune fille ôta son masque. Caché sous ce masque, ce costume, ce personnage de frêle jeune fille, il y avait un très vieux monsieur tout ridé ! (J’appris par la suite en lisant les journaux qu’il s’agissait d’un « maître » fort connu et très célèbre du Nô japonais traditionnel).

J’étais bluffée !  J’étais scotchée ! J’étais KO !

 

- Je l’aime

Elle ne s’ennuie jamais. A peine les yeux ouverts, elle commence à s’agiter ! Elle ouvre les volets, allume la radio, met de l’eau à chauffer, quelques croquettes dans ma gamelle… Elle presse une orange, ébouillante la théière, prend dans le placard bol et petite cuillère, ouvre et referme le réfrigérateur, verse le thé…

Enfin, elle s’assied  devant la table. Aussitôt je m’installe sur ses genoux… Et commence  le meilleur moment de la journée : Elle me caresse d’une main, de l’autre boit son Earl Grey, grignote une tartine de confiture, croque une amande, picore une fraise…. Nous écoutons La Matinale de France Musique. Comment mieux commencer la journée ? De la musique, le calme, rien que nous deux : Le bonheur ! Le samedi matin c’est encore mieux, car c’est une dame qui parle. Comment s’appelle-t-elle déjà ? Ah oui ! Dominique. J’aime beaucoup sa voix. Je ronronne de plaisir…

Elle a des tas d’amis. Quand ils viennent, en général  je m’éclipse. Je ne suis pas partageur ! Mais il arrive que je reste coincé dans la maison. Alors je les observe. Ils ont parfois des comportements  bizarres : Ils « dansent » au ralenti ! Non, pas exactement ! Comment dire ? Ils bougent avec des mouvements très lents, au son de musiques « planantes » ! Style : Clair de lune de Debussy sur fond de chants d’oiseaux, Nocturnes  de Chopin émaillés de tintements de bols tibétains, Aria de Bach ou Canon de Pachelbel  bercé de bruits de vagues. Vous voyez le genre ! Elle m’a expliqué que c’est une gymnastique chinoise qui s’appelle le Taï Chi Chuan, et que ça rend « zen ». C’est sûr qu’elle en aurait besoin ! En tous cas, ils ont l’air de bien s’amuser,  et moi ça m’énerve. Alors je miaule pour demander à sortir. Et ça les dérange. Hé ! hé ! Je suis diabolique !

Elle a des tas de jouets. C’est agaçant.  Par exemple, au lieu de s’occuper de moi, elle tripote un gros machin, rouge avec des boutons blancs, qu’elle porte sur sa poitrine avec des bretelles. Ca lui donne l’air d’un escargot à l’envers ! Il miaule en s’étirant, enfin il miaule, il gémit plutôt, il pleurniche. Il fait son intéressant quoi!  C’est une petite nature, il se plaint Barbara (de dos)sans arrêt. Et puis tout à coup, il devient très gai, et vas-y que c’est des bourrées, des valses, des javas. Et elle, elle chante en même temps : « Le piano du pauvre, se noue autour du cou, la chanson guimauve Toscanini s’en fout ! » N’importe quoi !

Elle s’amuse aussi avec une espèce de très grosse poêle en bois. Une poêle géante qu’on aurait serrée un peu au milieu. C’est creux à l’intérieur et ça résonne quand on tapote dessus. Ca vous dit quelque chose ? Non ? Pfttt ! Ca s’appelle une guitare, patate ! Et ben, vous ne savez pas ce qu’elle fait avec? J’en suis vert de jalousie ! Elle la prend dans ses bras, la pose sur ses genoux et lui gratte le ventre ! Et l’autre, elle chante ! Comme les cigales. Tu parles, elle est contente ! Je la déteste ! Mais comme dans l’ensemble c’est plutôt doux et harmonieux, ça me berce, et je m’endors…

Elle a encore  un autre jouet !  Il se cache dans un très gros meuble, genre bahut, commode… On ne le voit jamais. Il doit être bien laid ! Sur le devant il y a  une espèce de rabat, de couvercle qu’elle soulève et dessous, il y a comme d’énormes dents  blanches, intercalées de plus petites, noires. Elle s’assied devant et tape dessus des deux mains. Ca fait un bruit ! Il paraît que c’est un piano. Parfois elle a des gestes très gracieux, c’est lent et mélodieux, mais parfois elle a l’air très en colère. Elle tape de plus en plus fort, ses doigts bougent de plus en plus vite. Ca gronde, et ça résonne dans toute la pièce. Quelquefois  aussi, et ça je le crains, elle répète le même passage pendant des heures ! C’est fatiguant ! J’ai envie de lui dire : « Oui, oui, ça va ! On a entendu, on n’est pas sourd ! »

Mais le pire c’est quand elle sort de sa boite une espèce de tube noir en trois morceaux. (Un nouveau celui-là !). Elle porte à sa bouche le plus petit morceau et le suce quelques secondes. Pouah ! Puis elle assemble les morceaux et souffle dedans. Et là c’est l’horreur ! Mon cauchemar ! C’est strident, ça couine. On dirait qu’on tue le cochon ! Je m’étonne que les voisins n’aient encore rien dit. Ca doit les faire grincer des dents ! Moi, ça me vrille les oreilles. Et je fiche le camp !

Pourtant nous  écoutons de temps en temps  un disque dans lequel on entend un peu le même son, et là c’est très beau. Attendez ! Elle m’a dit le nom du morceau: L’Adagio du concerto pour clarinette de Mozart ! Voilà ! Ah ! Ca j’adore. Mais elle, ça a l’air de l’attrister. Elle soupire et grommelle entre ses dents : « Même pas en rêve ! Même pas dans une autre vie ! » Décidément il y a des moments où je ne la comprends pas.

Et c’est comme ça toute la journée !  Oui, elle me fait voir les pierres du chemin. Ce n’est pas une vie  pour  un chat d’avoir une maîtresse musicienne!

Mais, que voulez-vous ? Je l’aime!

 

 

 - Un dimanche à la campagne

Samedi 22h30. Je consulte une dernière fois la météo sur mon ordi. Bien ! Grand soleil pour demain, et, bonne nouvelle, le vent doit s’arrêter…Ou du moins se calmer. Super, la randonnée va être géniale! J’éteins l’écran et je vais me coucher. D’accord c’est un peu tôt pour un samedi soir mais il me faut être en forme demain. Je bouquine quelques pages, puis je sombre…

Dimanche 5h. Je me réveille énervée, fatiguée. Je jette un coup d’œil à ma montre : « Evidemment! Il n’est que 5h ! C’est pour ça que je suis crevée. Je n’ai pas assez dormi. Je ne vais jamais tenir le coup à marcher toute la journée… Bon, il faut se rendormir. Mais je n’ai pas sommeil ! Alors que faire? Je me mets à repasser dans ma tête ce que j’ai écrit la veille – En général c’est radical ! – Je rêve, je rêve…Il faut que je me fasse pousser les cheveux pour le spectacle de Jean-François. Il veut que j’ai l’allure un peu gitane…Ca tombe mal, je viens juste de les couper ! Peut-être, avec une perruque ? Je fais des essais avec la perruque et un foulard, mais il n’est pas convaincu. Puis sans la perruque avec le foulard…Ca ne lui plait pas non plus…Peut-être qu’avec  un chapeau?… Le rêve tourne au cauchemar !

Je me réveille en sursaut. 9h ! Cette fois, je suis à la bourre! Branle-bas de combat ! Rien n’est prêt. Ni mes fringues, ni mon sac. Et il faut que je quitte la maison à 10h dernier carat ! Il va falloir speeder ! Par contre pas question de zapper le petit déjeuner. Il faut pouvoir tenir jusqu’à la pause casse croute et dieu sait à quelle heure on va s’arrêter pour manger…  Déjeuner, douche. Quoi mettre comme fringues ? Avec ce temps de chiotte qu’il nous fait en ce mois de Juin on ne sait plus comment s’habiller, ma bonne dame !  Bon, ne traînons pas trop, il faut encore passer à la boulangerie acheter quelque chose à manger, parce que, bien entendu, je n’ai rien préparé ! Ne pas oublier l’eau. Un bon litre ! Oui, parce qu’à la dernière ballade, ½ litre ça avait été un peu juste. La casquette, les lunettes de soleil, une écharpe au cas où le vent ne s’arrêterait pas vraiment…

10h02 je démarre la voiture. 10h14, je suis à l’entrée de Nages ! Super, juste dans les temps ! Mais qu’est-ce que c’est que ce panneau ? Merde ! C’est la fête du village… Bon, c’est plus sage de se garer à l’entrée. J’oblique à gauche au petit rond point, et je me gare dans la rue en pente. Juste avant la maison de Lester. Je mets des cales sous mes roues au cas où. On n’est jamais trop prudent ! Et en route pour le lieu du rendez-vous : la mairie…

- Non, ce n’est pas la fête du village, mais une sorte de foire aux artisans. Il y a des étalages partout et quelques badauds qui déambulent avec des airs frileux, bien emmitouflés malgré le soleil, car n’en déplaise à la météo, le vent souffle comme un fou. Un vent à décorner tous les taureaux de Camargue ! Et il ne fait pas bien chaud. -

Devant la mairie, personne! Pas un chat, pas le moindre raton laveur, pas plus de randonneur que de beurre en broche. Rien ! Nib ! Wallou ! …. Mystère… Et là, soudain, un doute fulgurant me traverse l’esprit : « Est-ce que, par hasard, je ne me serais pas trompée de jour ?  Mon Dieu !!!! Oui!!! C’est dimanche 23 la randonnée  ! Dimanche prochain! Pas aujourd’hui !» Ah la la ! Me voilà bien avec mes grosses chaussures de marche et mon sac à dos ! J’ai l’air malin ! Et puis, qu’est-ce que je vais bien pouvoir faire toute la journée ? Je n’ai rien prévu!  Et ben, puisque c’est comme ça, j’irai au cinéma ! Na !

 

 - Les courses avec maman

Tous les ans à l’époque de la rentrée, maman montait une expédition commando à la ville. Objectif : renouveler un peu la garde-robe des enfants. Une année c’était les chaussures, l’année suivante les habits…etc. Jamais tout en même temps ! Ca n’était pas une mince affaire ! Les petits veinards d’aujourd’hui, dont les parents n’ont pas connu de guerre, s’étonneront peut-être  de ce que je vais vous raconter. Ils penseront sans doute que j’exagère. Les autres se souviendront. Mes parents avaient vécu celle de 39/40 et il leur en était resté des traces ! Surtout une,  indélébile : le manque ! Ils avaient manqué de tout ! Cela les avait marqués à jamais! Ils gardaient en eux, incrustée, la peur de l’avenir. Ils avaient donc développé, en seconde nature, une prudence instinctive de bête sauvage et des habitudes draconiennes d’économie. Il faut leur pardonner, ils avaient eu faim. Ils avaient dû manger des rutabagas et ça ne leur avait pas plu !

Plan de bataille : Le moindre achat devait, donc, être pesé, programmé longtemps à l’avance et organisé comme la campagne de Russie. Car, en plus, il fallait aller à la ville ! Alors, on faisait des achats groupés. Si on devait acheter une paire de chaussures à mon frère, on m’en achetait une aussi par la même occasion. Tout allait par deux. On partait tôt, de bon matin, pour être en position à l’ouverture des magasins. D’abord, on « faisait » les vitrines. Toutes ! Même celles des magasins où on savait qu’on n’achèterait jamais rien parce que c’était trop cher. C’était « pour se donner des idées » !

La bataille : Alors, on commençait à essayer. Bien sur, rien ne correspondait jamais vraiment à ce qui nous avait plu en vitrine. Il n’y avait jamais la pointure ou la couleur qu’on aurait voulue dans le modèle qu’on aurait voulu, ou la pointure qu’on aurait voulue avec la couleur qu’on aurait voulue…etc. Maman était sans pitié. Elle faisait tout déballer ! Le magasin devenait un champ de bataille, il y avait des boites à chaussures dans tous les coins. Les vendeuses, qui a notre entrée avaient eu un petit sourire condescendant, en voyant arriver notre smala fleurant bon sa campagne, s’arrachaient les cheveux. Elles s’y perdaient, devenaient folles, nous maudissant in petto… Bien entendu, on n’achetait jamais rien à ce premier tour ! C’était un tour de chauffe !  Ensuite, on faisait le point. C’est-à-dire que nous allions nous asseoir sur un banc pour réfléchir. Enfin…Maman réfléchissait! A haute voix! Nous, nous n’étions là que pour entériner ses décisions. Elle pesait longuement le pour et le contre. – Dame ! C’était pour longtemps ! -  Rapport qualité/prix, probabilités de durée compte tenu de notre aptitude intempestive à grandir,  de l’indice de solidité, et du facteur temps. (D’ailleurs, en règle générale, on prenait toujours une pointure au dessus !) Bref, tous ces éléments devaient être mis en équation. Lourde tâche! Quelquefois, dans les cas délicats, on refaisait  une tournée d’essayage. Je ne sais pas pourquoi, les vendeuses qui s’étaient déjà occupées de nous, disparaissaient précipitamment dans la réserve à notre arrivée, alors que, justement, on aurait voulu avoir à faire à la même, pour gagner du temps…Mystère !

La victoire : Enfin, on se décidait à acheter. Moment solennel ! Bien sûr, c’était toujours ce que maman avait choisi ! Ce n’était jamais la belle paire de chaussures que nous convoitions en secret, élégante, à la mode, celle qui aurait fait pâlir de jalousie les copains et les copines, mais qui, malheureusement, semblait trop fragile, ou était trop chère… Hélas !…Vous croyez que c’était fini ? Que nenni ! Le cérémonial n’était pas achevé. Les achats effectués et  les sacs de nos emplettes à la main, nous refaisions le tour complet des vitrines, pour nous conforter (surtout maman) dans l’idée que nous avions fait le meilleur choix. Puis on regagnait la voiture en se congratulant.

Retour triomphal au pays : De retour à la maison, on enfilait les affaires neuves pour les faire admirer à papa. On paradait devant lui. Et bien sûr, il applaudissait et nous félicitait  haut et fort ! – Il ne nous accompagnait jamais dans ces expéditions. Il s’en gardait bien ! – papa 1952Puis on s’occupait à décaler notre garde-robe. Car, il y avait les habits dits  du dimanche  qu’on mettait dans les grandes occasions et ceux dits  de tous les jours. Ainsi, les anciennes chaussures du dimanche se retrouvaient reléguées au rang inférieur de chaussures de tous les jours, tandis que les nouvelles acquisitions se trouvaient promues, de facto,  au grade de du dimanche.  – J’espère que vous vous y retrouvez ! –

Epilogue : Bien sûr, ne vous méprenez pas, nous n’étions pas malheureux, et nous n’avons jamais manqué de rien ! Notre manque, notre frustration à nous, a concerné le superflu. Nous avons manqué de superflu, d’inutile, de choses « pour le plaisir ».  Il va sans dire, qu’aujourd’hui, j’ai des armoires qui débordent de chaussures et de vêtements. Revanche ? Sans doute ! Et encore pas complète car je ne peux m’empêcher de courir les solderies, les braderies. Je suis une inconditionnelle des vide-greniers. Hé oui ! Malgré tout, je ne peux m’empêcher de faire attention à la dépense. Je m’autorise difficilement le gaspillage. Je me rebelle, oui, mais à moitié. Je continue inconsciemment à appliquer le règlement ! On ne sait jamais ! Qu’est-ce que maman dirait !

 

 - Christine

Depuis quelques temps, il se passait des choses étonnantes à la maison! La vie semblait s’être accélérée. La vie bougeait dans tous les sens, en désordre, bousculant son univers familier.Déjà, fait important, depuis un mois, elle portait des soutiens-gorges! Ce n’était pas qu’elle eût beaucoup de poitrine, mais toutes ses copines en mettaient. Alors…Elle n’aurait pas voulu être en reste! Et puis surtout, il y avait eu ce matin où, au réveil, elle avait cru avoir fait pipi au lit. Puis elle avait vu que ce qui lui coulait entre les jambes était foncé et un peu visqueux, comme du sang – et d’ailleurs c’était du sang – et elle avait eu très peur ! Pourtant ça n’avait pas inquiété maman, ça avait même eu l’air de lui faire plaisir ! Elle lui avait expliqué que c’était normal pour une fille et que d’ailleurs désormais ça serait comme ça tous les mois. Et elle avait conclu en disant:  « Et bien, Cricri, te voilà maintenant une grande fille!». Et ça avait été tout….Christine n’avait pas compris grand chose. Seulement, depuis, tous les mois, elle avait mal au ventre, il fallait mettre ces espèces de serviettes entre les jambes – et malgré ça, elle avait toujours sa culotte un peu tachée et ça ne sentait pas bon ! – Non ! Vraiment, ce n’était pas du tout drôle d’être une grande fille !

Et puis, pour quoi faire ? Au collège, la grande Julie, une redoublante, lui avait confié, avec des mines de conspiratrice, que c’était pour faire les enfants ! ???? Sa voisine de classe, Maryse, elle, prétendait que pas du tout, qu’on faisait les enfants en buvant son café dans la même tasse. !!!!! Oui ! Mais Maryse était restée un peu bébé ! Il n’y avait qu’elle pour croire encore à de pareilles bêtises. Alors elle avait interrogé Josiane, la spécialiste des questions médicales, grâce à sa tante infirmière. Et Josiane avait été péremptoire : « C’est quand on dort dans le même lit, et qu’on s’embrasse en mettant la langue.» Quelle horreur ! Mais, en fin de compte, le mystère restait entier.

 

Depuis, c’est vrai, rien n’était plus comme avant. Elle ressentait comme des langueurs, des tristesses, sans trop savoir pourquoi, et puis soudain des joies subites, des enthousiasmes délirants, sans beaucoup plus de raisons. Par moments, elle avait l’impression d’être dépositaire d’un précieux secret, d’être devenue quelqu’un d’important, qu’un destin merveilleux se préparait pour elle dans l’ombre. Et l’instant d’après, c’était à nouveau une étrange mélancolie qui l’envahissait, la laissant au bord des larmes. Elle devenait ombrageuse, insolente, elle se vexait pour un rien. Personne ne la comprenait ! – « Cricri m’inquiète, disait maman à papa, elle ne chante plus, elle ne rit plus, et on ne peut plus rien lui dire. » – « Oh, ça lui passera » répondait papa, toujours optimiste, toujours enclin à ignorer ce qui pouvait troubler sa tranquillité, le distraire de ses chères mathématiques. Et Pierre, son grand frère, en rajoutait une couche :- « Les filles, il faut toujours que ça fasse des histoires pour rien. » Et il se servait, en douce, une deuxième portion de tarte aux pommes.

Et les jours s’écoulaient…Vinrent les vacances de Pâques, pluvieuses et ventées comme souvent…

Ce jour là pourtant, par extraordinaire, il faisait beau. Perchée sur la fenêtre de la buanderie, le visage au soleil, elle était plongée dans la lecture du  Le Grand Meaulnes. Les aventures d’Augustin Meaulnes dans la brumeuse et marécageuse Sologne la ravissaient, du même plaisir qu’on peut prendre à suivre les épreuves de naufragés perdus dans la tempête, alors qu’on est soi-même bien au chaud au fond de son lit douillet….C’est alors qu’elle l’aperçut, devant elle ! Le plus grand, le plus beau de tous les copains de son frère, son préféré : Christophe ! Pourtant, habituellement, les amis de son frère l’ignoraient royalement. Quand, par hasard, ils s’apercevaient de sa présence, c’était pour se moquer d’elle en l’appelant Bébé !   « Attention, taisez-vous, Bébé Cricri arrive ! » disaient-ils. Ils ne voulaient jamais la laisser jouer avec eux, même pas aux cartes. Elle avait toujours l’impression de les déranger…Et voilà qu’au lieu de passer sans la voir, comme toujours, Christophe s’était arrêté, et il était là, appuyé nonchalamment contre le mur :  – « Qu’est-ce que tu lis, Christine ? »         – « Le Grand Meaulnes… » – « Ah oui ? Ca te plait ? C’est bien non ? Moi je me souviens j’avais beaucoup aimé… la fête dans le château… la rencontre avec la jeune fille… le bohémien…»  Il lui parlait très sérieusement. Elle eut l’impression que le soleil brillait plus fort, tout à coup !  Elle se sentit rougir, mais réussit à articuler : -« Oui, ça me plait, c’est beau. Mais, ça m’angoisse un peu, j’ai peur que ça finisse mal! Est-ce qu’il va la retrouver, à la fin, la Jeune Fille du Domaine inconnu ? » Une bouffée de lilas en fleur lui arriva tout à coup. Son cerveau l’enregistra machinalement pour plus tard et elle pensa bêtement : « Plus que trois jour avant la rentrée. Quel dommage ! » Il  sembla hésiter, puis avec un petit sourire complice : -« Il vaut mieux que je ne te le dise pas, ça te gâcherait tout le plaisir. On en parlera quand  tu auras fini de le lire… Et puis, comme tu as aimé Le Grand Meaulnes, si tu veux, je te prêterai d’autres livres… Allez, au revoir Christine… Christine ? C’est un nom de reine ça ! »  Et il la salua comme au théâtre : « A bientôt votre majesté ! » Mais il ne se moquait pas. Vraiment pas ! Elle en était sûre.

Elle le  regarda s’éloigner. Puis fermant le livre, elle sauta de son perchoir, et courut se cacher au fond du jardin. Elle dansa une gigue effrénée autour du vieux figuier, faisant fuir, indigné, le chat qui somnolait sur une branche. Elle aurait aimé le crier ! « Christophe lui avait parlé ! Christophe lui avait parlé ! Et  il allait lui prêter des livres…» Il lui avait parlé comme à une grande et il l’avait appelée Christine ! Allons, allons, finalement la vie valait la peine d’être vécue, malgré tout !

 

- L’Amour c’est comme le foot!

« Les amoureux sont seuls au monde » dit-on « Tea for two and two for tea »…Que nenni! Rien de plus faux. On n’est pas seulement deux dans une histoire d’amour. Ils sont tous là avec nous, les parents, les grands parents, les ancêtres qui sourient benoîtement dans l’album photo. Tous nus sur une peau de bique, en costume de première communion, en robe de mariée, au service militaire, à la neige, à la plage, à la guerre! Ils vous ont des airs de ne pas y toucher. Mais c’est faux. Ils sont tous là à nous donner des conseils : « Fais pas ci, fais pas ça,  fais pas comme tante, fais comme ton père ! » Même si on ne les a pas connus ! Ils veulent qu’on leur rende justice, qu’on leur donne raison, qu’on continue le combat pour eux. Comme dans les vendettas corses où on ne sait même plus qui a commencé ni pourquoi. Ils essaient d’exister encore à travers nous. Ils nous vampirisent !

Toutes ces générations de femmes qui ont fait le signe de croix avant et après l’amour, pour ne pas avoir d’enfants ou pour en avoir ! Ces générations d’hommes qui on fait l’amour à leur femme sans jamais se préoccuper de son plaisir à elle ! Grand-père Jules qui  trompait sa femme et grimpait le soir en cachette chez la voisine, par l’échelle. Grand-mère Eva, sa femme, qui envoyait ma mère au milieu de la nuit retirer l’échelle ! Son fils, mon cousin Laurent, qui m’avait dit alors que je partais en voyage à Berlin : « Et ne nous ramène pas un Allemand ! » Evidemment, son père avait été tué en 40 par les allemands ! On le comprend. Mais, comment arrêter cette chaîne infernale ? Et Papa, qui paraît-il,  s’était vu refusé par la famille de son premier amour, parce que son père à lui avait été ouvrier chez son père à elle !

Non, Roméo et Juliette, Marius et Fanny, c’est arrivé près de chez vous, c’est vous, c’est moi ! …Et les héros de films, les héros de roman ? Ils nous influencent  eux-aussi. Scarlett O’Hara et Rett Butler, Mme Bovary, Julien Sorel, Bridget Jones…Tiens! Les Parapluies de Cherbourg…  « Non, je ne pourrai jamais vivre sans toi…. »

Et puis, il y a aussi la quantité d’amour qu’on a reçu dans son enfance. Allez, allongez vous et parlez-moi de votre papa et de votre maman : « Est-ce que vous vous êtes senti assez aimé par vos parents ? Ou trop ? Êtes-vous en manque d’amour, ou en overdose? Si vous êtes en manque d’amour, vous aurez tendance à être jaloux, parce que vous avez peur d’être abandonné. Si vous êtes en overdose d’amour, vous ne voudrez pas vous engager, par peur d’être encore étouffé. » Bon d’accord, c’est plus compliqué que ça! Mais il y a de ça… Et il y a aussi les enfants. On fait des tas de choses pour les enfants. Se marier, parce qu’il y a un enfant en route. Rester avec quelqu’un « pour les enfants ! »  Faire un enfant pour raccommoder  un couple qui bat de l’aile.

Comment voulez-vous qu’on s’en sorte ? On est cernés ! C’est la faute à personne, c’est la faute à tout le monde.

Je vais vous dire, moi: L’amour, c’est comme le foot. C’est un sport d’équipe. Il y a les grands parents, à l’arrière : Grand-mère : « Fais un riche mariage, petite, de toutes façons, il te trompera ! » Grand père: « Te laisse pas passer la corde au cou. Les filles tout ce qu’elles veulent c’est se faire épouser ! Et après tu les as sur les bras pour toute la vie»    La mère : « Tu sais, ma fille, l’amour physique, on en revient… » Le père, avant centre : « Méfie-toi, petit, si tu laisses ta femme porter la culotte, tu es foutu » Tonton René, à l’extrême droite: « Ne l’envoyez pas au conservatoire, ça ne fait que des vieilles filles. » Tata Lucie, à l’aile gauche : « Si tu couches avec lui, il ne te respectera plus et il ne t’épousera jamais !» Dans les buts, le cousin Roger, le goal: «Regarde- moi, j’ai une belle voiture, et elles tombent comme des mouches ! » Votre copain Raoul vous fait des grands signes: « Tu ne vois pas que cette fille ne t’aime pas, qu’elle n’en veut qu’à tes sous ? » Votre meilleure amie siffle : « Faute ! Tu vois bien que ce type n’est pas pour toi. C’est un minable. Il ne fera jamais rien de bien »

Même le voisin de palier s’en mêle : « Va doucement, petit, tu as bien le temps de te marier, amuse-toi un peu d’abord ! » Et moi aussi je suis là, dans les tribunes, et je crie à ma fille: « Ton père a jamais assuré une cacahuète ! Les hommes, on ne peut pas compter dessus ! » Et le boulanger : « Regarde, la voilà la Pomponnette. Garce, salope, ordure, c’est maintenant que tu reviens ! » Honorine : « Elle finira comme sa tante Zoé » Le père au docteur : « Si c’est un garçon, sauvez l’enfant, si c’est une fille sauvez la mère ! » Tonton Cloclo s’en mêle : « Les filles, tu sais, méfie-toi c’est pas c’que tu crois ! » Tonton Guy Mardel surenchérit :  « N’avoue jamais, jamais, jamais, oh non jamais, n’avoue jamais que tu l’ai – ai – aimes… » Tonton Georges y va de son couplet lui-aussi : « Une jolie fleur dans une peau d’vache, une jolie vache déguisée en fleur, qui fait la belle et qui vous attache et qui vous mène par le bout du cœur. Ah !Ah ! Putain de toi, Ah ! Ah ! Pauvre de moi … » Tonton Johnny en rajoute une couche : « Car tout change et tout casse, et tout passe, et tout lasse. Le désir, le plaisir se dilue dans l’espace. Et, tu n’auras plus rien !» Cousine Marie: « On peut vivre sans richesse, presque sans un sou, des seigneurs et des princesses y en a pas beaucoup mais vivre sans tendresse, on ne le pourrait pas. Non, non, non, non, on ne le pourrait pas. » Cousine Edith : « Quand il me prend dans ses bras, qu’il me parle tout bas… »

Et oui, l’amour c’est tellement bien. Ca vous rend beau, ça vous rend bon. Ca vous donne de l’énergie, ça vous fait rajeunir ! Tiens, ça doit même pouvoir guérir… Alors, pourquoi ne pas se laisser aller tout simplement. « Aimer, même trop, même mal » comme disait tonton Jacques. (Je l’avais oublié celui-là !) Après tout, qu’est-ce qu’on risque ? D’avoir mal ? Mais sans amour la vie ne vaudrait pas tripette… Et même si c’est un feu de paille, l’amour c’est un sacré feu de joie!

L’amour c’est le Paradis sur la terre !

 

 - Lettre à Mr le directeur

A Mr le directeur de l’agence France Télécom Languedoc Roussillon, 52 rue de la méditerranée, Montpellier cedex 3.

Monsieur,

J’ai reçu ce matin votre lettre en date du 16/02/2013 m’informant que j’étais redevable de la somme de 90,50 Euros T.T.C, correspondant à ma consommation téléphonique et à mon abonnement. Preuve incontestable du fait que j’existais, que je comptais pour quelqu’un au monde.

Mr le directeur, je voudrais vous remercier et vous dire combien j’ai été émue en voyant ce petit rectangle blanc, message timide et discret que vous aviez confié avec délicatesse aux bons soins de La Poste….Je guettais, depuis des mois le jour ou vous vous décideriez à rompre le cruel silence qui s’était installé entre nous, me signifiant ainsi que le stupide malentendu qui pesait sur notre relation depuis trop longtemps était définitivement dissipé, que vous aviez enfin compris qu’il était temps de reconnaître ses erreurs et de pardonner. Que s’il est bon parfois de se montrer fort, il faut aussi, parfois, laisser parler sa sensibilité…Vous savez comme je suis fière ! Je n’aurais jamais fait le premier pas, dût-il m’en coûter la suspension de ma ligne, et si dure que soit la solitude où vous m’aviez laissé, que seule rompait parfois, mais si rarement, la tendre sollicitude de Mr le directeur de l’agence EDF, ou du Crédit Agricole, mes vieux amis, toujours fidèles.

Certes, les apparences légitimaient votre jalousie et votre colère, mais à cela, je ne pouvais opposer, vous le comprenez bien maintenant, que le silence de l’innocence et me cantonner dans une attitude froide et digne. Allons ! Gagez qu’un jour on la retrouvera cette lettre perdue, dont la disparition nous a fait tant de mal !

Monsieur le directeur, je voudrais vous dire que j’ai parfaitement su discerner, à travers le soin que vous avez mis à la rédaction de cette lettre, l’émotion que vous tentiez de dissimuler, vieux sauvage que vous êtes, sous un style volontairement sec et impersonnel, mais qui, pour des yeux qui s’intéressent tendrement à vous, se laissait percer à jour, par endroits, comme par exemple, le lapsus involontaire d’écrire en rouge « à payer avant le 26/02/2013 » trahissant votre impatience à me voir vous répondre…

J’ai apprécié, aussi, avec quel souci de clarté vous m’indiquiez comment comprendre ma facture et combien il serait plus facile pour moi de payer par TIP plutôt que par chèque. Et quelle fougue vous mettiez à me conseiller d’opter pour le prélèvement automatique, ou le paiement en ligne, prévenances qui me faisaient mesurer combien mon bien être et mon confort vous tiennent à cœur. N’ayez crainte, j’ai bien noté votre adresse, écrite en rouge comme avec votre sang, comme une rose rouge offerte, presque comme un baiser.

Mr le directeur de l’agence France Télécom Languedoc  Roussillon, après cela je ne puis que vous murmurer : « A bientôt…2 mois…Comme le temps va me paraître long ! »

 - Couches, petits pots, réunions de parents d’élèves.

On se disait : « Ca n’existe pas ! C’est une invention des hommes pour pouvoir en prendre une plus jeune! » Ou alors :  « Ca n’arrive qu’aux autres ! Aux mémères, aux bobonnes, à celles qui ont lâché prise, celles qui ont accepté de vieillir parce qu’elles ne savent pas quoi faire de leur vie, parce qu’elles n’ont pas de but dans la vie… Alors que nous, les battantes, les super-women, qui avons toujours assuré et assurons toujours comme des bêtes, sur tous les fronts, nous qui faisons du sport, mangeons bio, ça ne peut pas nous arriver. »

Et bien si ! Ca arrive. Ou plutôt ça s’en va, un beau jour sans prévenir, comme ç’était venu. Et sur le coup, on en prend un sacré coup de vieux ! Au physique mais surtout au moral. On se met  à flipper devant les pubs pour Tampax, on se retrouve en larmes devant celles pour Pampers ! Et on déprime en ruminant : « Tout ça c’est fini, je suis vieille. » Notre cauchemar c’est de tomber sur les pubs pour les couches anti- fuites urinaires, vous savez les trois dames :  « Laquelle de ces femmes porte une couche anti-fuite ? » comme autrefois les réclames pour les crèmes de beauté :  «  Laquelle est la mère, laquelle est la fille ? » Toujours les mêmes recettes ! Mais le pire ce sont les offres de conventions obsèques ! Cauchemardissime ! On s’y voit déjà !

Et puis, les jours passent…La vie continue, sans grand changement au fond. Et on s’y fait, très bien ! Même, on trouve bien agréable d’être débarrassée de tout ça… Surtout quand on voit nos ex, encore en service à la cinquantaine bien tassée, corvéables à merci, réquisitionnés en permanence pour ces chères têtes blondes, (les enfants qu’ils ont eu avec leur nouvelle compagne -et avec elles ils marchent droit, c’est pas comme avec nous !). On les voit peiner chaque jour pour être à l’heure à l’école, transformés en taxi, le mercredi,  pour les emmener du foot au club photo- de la danse à la piscine –avec toute la ville à traverser- consignés tous les soirs à la maison (le bain, faire réciter les leçons), d’astreinte le samedi pour aller les chercher après le cinéma… Enfin tout ce qu’on a déjà vécu ! (Nous, pas eux. Parce que, la première fois, avec nous ils l’avaient pris cool ! Dame, après 68 ! C’est nous qui nous nous étions tout tapé !

Hé, il y a une justice finalement parce que pendant ce temps-là, nous, on est tranquilles ! Bien installées dans notre fauteuil favori en train de lire un bon bouquin, ou à table entre amis en train de refaire le monde, sans avoir à faire la police au milieu de cris d’enfant : « Maman ! Kevin m’empêche de regarder Spider Man ! Maman ! Samantha m’a pris ma Play Station…. »  Et on se dit que la nature est bien faite, qui a prévu pour nous à l’avance qu’on serait fatiguées, qu’on en aurait marre d’assurer, et pas du tout envie de recommencer.. Qu’on aurait envie de s’occuper de nous, plus de la marmaille ! Et ça nous fait des vacances : «  Tiens ! J’ai toujours  rêvé d’apprendre à danser le tango, faire du théâtre ! Non, Je vais commencer à écrire un bouquin ! Eh alors, pourquoi pas !»

C’est une deuxième jeunesse. Fini, les Tampax, le mal au ventre, la pilule, la migraine, fini « biberons, couches,  petits pots, réunions de parents d’élèves » Vive la liberté, vive la ménopause !

 

- MEFIEZ-VOUS DU CARAMEL !

Un des  grands regrets  de ma mère était de n’avoir pas pu étudier le piano. C’est ainsi que, bien qu’enfants  de viticulteur, mon frère et moi  fûmes mis très tôt à l’étude de cet instrument. J’ai donc débuté à l’âge de cinq ans. – Je me souviens d’ailleurs qu’au tout début nous n’avions pas encore de piano à la maison et que nous faisions jouer nos doigts sur une feuille de papier où était dessiné, grandeur nature, un clavier – Notre professeur était une dame à la retraite qui habitait le village voisin. Elle arrivait dans une vieille Citroën brinquebalante qui, quelquefois, tombait en panne. Alors nous devions nous rendre chez elle pour prendre notre leçon. Ce n’était pas de gaité de coeur car cette dame possédait cinq ou six chats et sa maison empestait ! Mais passons… Je découvris  les joies du solfège, les délices des dictées musicales (mon cauchemar !). J’apprivoisai  la clé de fa, triomphai de la mémorisation des dièses et des bémols, et vins à bout de la Méthode Rose. Je me colletais avec  les gammes et les arpèges, mais j’adorais les études progressives de Ferté, Czerny et surtout les Classiques Favoris. Très rapidement, je m’étais aperçue que jouer de cet instrument m’apportait de grandes joies, me consolait de tous les maux, de toutes les peines. Lorsque j’avais un chagrin (gros bien entendu) j’allais me mettre au piano… Je massacrais allègrement la Valse Favorite de Mozart, la Lettre à Elise de Beethoven,  Le Petit Cavalier de Schumann… et j’oubliais tout!… A sept ans, je présentai  le petit concours du Royaume de la Musique, et j’obtins le diplôme de « Sujet » de ce royaume. Ce n’était pas une récompense très prestigieuse, mais à sept ans…je n’étais pas peu fière ! Puis je présentai  le concours d’entrée au conservatoire municipal de  la petite ville voisine. J’y fus reçue première, et mon frère….dernier ! Mais nous fûmes reçus tous les deux !  Preuve que notre «tatie piano» avait bien fait son travail. Paradoxalement,  c’est alors que les choses se gâtèrent…

Comme nous habitions la campagne, j’avais obtenu une dérogation pour pouvoir regrouper tous mes cours, piano et solfège, dans la même journée. Le jeudi après-midi. A cause de ces horaires spéciaux, je me retrouvai, en classe de solfège, seule fille au milieu de garçons bien plus âgés que moi ! Et ces garnements prenaient un malin plaisir à me faire des grimaces, à se moquer de moi derrière mon dos, à ricaner, à me chuchoter des horreurs, dans les couloirs et même pendant le cours. Comme j’étais petite et timide, le professeur m’avait prise sous sa protection et placée au premier rang. Mais cette sollicitude, loin de me protéger, redoublait l’hostilité des élèves. Plus il était gentil et indulgent avec moi, plus les autres redoublaient  leurs brimades. Et cette journée était pour moi un supplice ! Je redoutais le jeudi, je le voyais s’approcher avec appréhension, j’en faisais des cauchemars. Je tins un an et demi!

L’année suivante, une semaine avant l’examen de fin d’année, par un après-midi pluvieux, maman entreprit de faire du caramel pour le dessert du soir. Profitant de ce qu’elle avait le dos tourné, je voulus le goûter et, avant qu’elle ait pu intervenir,  je plongeais l’index de ma main droite dans la casserole ! (Acte manqué réussi ?) Le caramel bouillant se colla à mon doigt, je me brûlai, et il en résulta une grosse cloque, qui, comme par un fait  exprès, se perça le jour de l’examen. Justement ! Mon doigt douloureux m’empêcha de jouer correctement et je fus recalée. Cet incident mit un point final à mes aventures musicales dans le giron du conservatoire… Ainsi  fut peut-être tuée dans l’œuf une brillante carrière de pianiste concertiste virtuose !?

Ce n’était pas ma route…Mais devant moi brillait un autre sentier car me voici aujourd’hui chanteuse, auteur-compositeur-interprète, et comédienne. « Les voies du Seigneur sont impénétrables ! », dit-on.

 

 -Les matins où l’on change d’heure….

Chaque fois qu’on change d’heure, tout le monde râle ! Pourtant, les matins où l’on change d’heure ont quelque chose de magique. Surtout celui du printemps! C’est le meilleur, car, tout de suite on voit les jours qui durent plus longtemps. Et, même si on doit se lever plus tôt, on sait qu’on tient le bon bout,  qu’on va vers l’été, qu’on s’est rapproché un peu plus des Grandes Vacances…Celui d’octobre est un peu plus délicat. Il nous donne souvent un peu de vague à l’âme, de morosité, avec cette nuit qui tombe très tôt tout à coup, ces soirées sombres et froides, et cet hiver qui s’approche, menaçant. En revanche, il nous permet une grasse matinée royale.

Mais surtout, ces jours de changement d’heure, c’est un peu comme ces lendemains de fête où on se lève pas très bien réveillé, comme encore un peu ivre de la veille, la tête dans du coton,  où l’on sait qu’on va traîner en pyjama toute la matinée, (peut-être même on va se recoucher après avoir  pris le petit déjeuner.) Enfin on va buller toute la journée, à rien faire, à lire des BD vautré sur la banquette, à somnoler devant la télé…Les matins où l’on change d’heure, on flotte entre deux eaux, on flotte dans le temps. On n’est plus vraiment dans une heure, et pas encore tout à fait dans l’autre. D’ailleurs, ça donne, toujours lieu à des quiproquos.Par exemple, si on a invité des amis à dîner, il y a toujours un étourdi qui arrive une heure en retard (ou en avance). Puis il y a aussi ceux qui se trompent, systématiquement, qui à chaque fois avancent l’heure quand il faudrait la reculer, ou le contraire. Même après des années ! Et malgré tous les procédés mnémotechniques qu’on a inventés pour s’en souvenir: « Alors avril AV j’avance, octobre RE je recule… »

Les matins où l’on change d’heure, c’est la pagaille !Tout est un peu sens dessus dessous, ce n’est pas sérieux.On a envie de crier :  « Poisson d’avril ! » Ca me rappelle ces après-midi de pluie, quand on était petit, où on s’amusait à se déguiser. On jouait à la princesse, au mousquetaire, à la marchande, à être quelqu’un d’autre !… Ces matins d’hiver où on n’allait pas à l’école parce que, dans la nuit, la neige était tombée…Ou encore cette période entre Noël et le jour de l’an où tout semble tourner au ralenti.  Plus de courrier important, (plus de factures !) plus guère de rendez-vous de travail, et l’on sait que rien de mauvais ne peut vraiment arriver. Les matins où on change d’heure, ça a un petit air de vacances, de fête. C’est Noël avant l’heure. Un dimanche dans le dimanche! Parce que, d’abord, ça tombe toujours un dimanche. Alors si on se trompe, ça n’est pas grave. Tôt ou tard, en écoutant la radio, la télévision, on rectifiera le tir…On remettra les pendules à l’heure !

Mais, quand même, il y a là une heure qui se ballade en liberté ! Et dont peut faire ce que l’on veut. Jusqu’au soir ! Comme Cendrillon, on sait qu’à Minuit, la fête sera finie, mais pour l’instant…..On est comme des collégiens lorsque le prof de maths est en retard :  « peut-être qu’il ne va pas venir du tout ? et qu’on ira en étude ? » On sait très bien qu’il va finir pas arriver, (un prof de maths malade, ça n’existe pas !) mais l’espace d’un instant, on joue à croire qu’il ne viendra pas.

Les matins où l’on change d’heure, ce sont des instants comme ça. Du temps qui ne compte pas. Du temps qui n’existe pas. Virtuel.Comme dans les romans de science fiction, on flotte dans la dimension X : « Allo, la terre, avons perdu le contrôle, sommes coincés en 20015. Envoyez vaisseau de secours pour nous récupérer. Terminé. » C’est de l’espace dans le temps. Et du temps qu’on ne rendra pas ! Du temps volé, grappillé. Du rab. Du temps pour rien, gratuit. Cadeau !

Les matins où l’on change d’heure, on a droit à une partie gratuite !

-Manu

Manu rentra chez lui vers 20 h. Epuisé! Il referma la porte et poussa un soupir d’aise : « enfin seul! » Ses yeux firent, machinalement, le tour du petit studio bien rangé. Tout était en ordre! Satisfait, il envoya valser ses espadrilles et se laissa tomber sur le divan : « Quelle journée !… Et cette chaleur qui arrive toujours d’un coup à la fin juin!… Et cette réparation qui n’en finissait plus!… Et Marcel qui veut toujours aller boire un coup après le boulot ! Quelle plaie celui-là avec son répertoire d’histoires belges! » Il aurait bien traîné un peu à rêvasser sur le divan, mais la perspective de la soirée le fit se secouer : « Non, non, je suis sale et moite, je sens la sueur. Au travail ! » Il quitta sa salopette tâchée de graisse et de cambouis et entra dans la salle de bains. L’eau fraîche le revigora : « Y a pas ! Rien de tel qu’une bonne douche froide pour vous mettre en forme. » Il se savonna longuement, avec son savon préféré Vanille Bourbon. Puis se rasa soigneusement, attentif à ne pas se couper. Il sortit de la douche encore ruisselant, s’enveloppa les reins d’une serviette et, pieds nus sur le carrelage encore tiède, alla s’allumer une cigarette. Soufflant lentement la fumée, il rêva un instant à regarder, comme un enfant émerveillé, les traces humides de ses pieds s’évaporer peu à peu sur le sol, comme autrefois sur le sable mouillé, quand il était petit au bord de la mer… puis pris une bière dans le frigo, s’assit à la table et réfléchit : « Quelle robe allait-il mettre ? La noire longue et moulante, très chic ? – Non, Chris avait dit : « chic mais sans trop.» – ou la rouge en tissu chamarré à broderies vert et or, style indien ? Non, non, ce soir pas de délire babas cool!  Peut-être la bleue à reflets moirés, fendue sur le côté, avec de petites incrustations de perles ? Fausses, bien entendu, les perles ! Ou alors, la jupe en cuir, un peu provoc, rock’n roll ? » Après quelques essais devant la glace, il choisit la robe bleue. Elle mettait en valeur ses longues jambes et ses chevilles étonnamment fines pour un homme : « Les jambes de Marlène » disait fièrement sa mère quand il était ado. « Bien sûr les hauts talons argents! Une semaine de salaire ! une folie… et encore… une dégriffe… » Il se maquilla légèrement, un peu de khôl pour faire briller l’œil, un peu d’ombre à paupières. « Pas trop !  Surtout pas de faux cils comme Micky qui ne peut s’empêcher de forcer la note. On ne va pas à la Gay Pride. »– « Du brillant à lèvres, ça oui…et la perruque neuve : un mois de salaire ! Oui mais que de vrais cheveux, et si douce. Des bijoux ? Non. Pas de bijoux. Les bijoux, ou c’est des vrais très beaux ou on n’en met pas ! Un peu de Chanel 5, comme Marylin… Voilà! » La pochette Hermès à fermoir d’argent attendait déjà sur la commode : «Le dernier cadeau d’anniversaire de Julien… Ah non, il ne faut pas penser à ça, ce soir, c’est la fête! » Il se regarda une dernière fois dans la glace « pas mal ! » s’envoya un baiser et sortit. Tout en en fredonnant « Ce soir je serai la plus belle pour aller danser êêê… », il descendit, comme une star, les quatre étages sans ascenseur de l’immeuble crasseux, aussi sérieusement que si c’était les marches du Palais des Festivals. D’un geste de reine, il claqua la lourde porte d’entrée, et s’élança d’un pas léger dans la nuit.

 -Une petite place pour le fromage !

 La première fois qu’il l’avait dit, c’était un dimanche matin. Vous alliez ensemble au marché faire des courses pour le repas de midi : quelques olives pour l’apéro avec des anchois parfumés, une bonne bouteille… peut-être des cèpes pour accompagner le rôti, 2 ou 3 pélardons, quelques fraises… Bref de quoi faire une dînette en amoureux… suivie d’une sieste crapuleuse! C’était au tout début de votre liaison, un des premiers week-end, après une nuit torride et passionnée. Vous étiez tous deux pâles et fatigués (vous n’aviez pas beaucoup dormi), et heureux.Vous étiez blottie contre lui dans la voiture. Il conduisait d’une main. L’autre, la droite, était posée sur votre genou. Il était beau, vous étiez belle. Il faisait beau, vous étiez amoureuse… Il cherchait une place pour se garer (Les jours de marché c’est toujours difficile, y a un monde fou! ) Et il avait prononcé cette phrase en boutade:  « je voudrais une place, s’il vous plait… S’il vous plait, une petite place pour le fromage ! ». Vous aviez ri, vous aviez trouvé ça charmant. Venant de lui, tout vous aurait paru charmant !

La deuxième fois, c’était un mois plus tard, dans les mêmes circonstances. Et quand il l’avait prononcée à nouveau cette phrase, vous aviez été émue. Car elle soulignait implicitement que ce n’était pas la première fois que vous alliez ensemble à ce marché, et donc que votre relation était bien installée, puisque vous aviez déjà des souvenirs en commun.Vous aviez ri, vous aviez trouvé ça charmant.

La troisième fois, c’était toujours dans les mêmes circonstances, mais peut-être trois ou quatre mois après. Cette fois-là, c’est vous qui l’avez prononcé à sa place, tellement vous sentiez qu’il allait le dire une fois encore, et que ça allait vous agacer ! Pour l’en empêcher, et lui  épargner le ridicule! Car vous ne vouliez pas qu’il vous déçoive. Vous le vouliez parfait ! Alors vous vous êtes faite complice pour ne pas admettre que vous aviez senti la fêlure, la faille, que vous n’étiez plus éblouie, que vous étiez moins amoureuse.

Il avait ri, il avait trouvé ça charmant.

La 4° fois, c’était lui à nouveau. Ca vous avait agacée, mais vous aviez essayé de vous raconter qu’il avait dit ça comme une plaisanterie entre vous, une connivence de vieux couple! Vous savez, un peu comme ces boutades lancées un jour par un aïeul, pas forcément très fines, mais qui font partie du patrimoine familial. Qu’on se transmet de générations en générations, comme des répliques célèbres, qu’on se remémore avec émotion, qu’il faut connaître! Comme un signe de reconnaissance, un mot de passe : ceux qui rient sont de la famille, les autres pas ! Mais vous n’y aviez pas vraiment cru . Et, d’ailleurs, personne n’avait ri !

La 5° fois, vous n’avez pu vous empêcher de faire une remarque acerbe.

La 6° fois, vous avez été lâche. Vous avez fait semblant de ne rien entendre.

La 7° fois, vous l’avez quitté !

 

13 réponses à Nouvelles

  1. You can certainly see your enthusiasm in the paintings you write. The sector hopes for more passionate writers like you who are not afraid to say how they believe. Always go after your heart. « The point of quotations is that one can use another’s words to be insulting. » by Amanda Cross.

  2. I like what you guys are up also. Such smart work and reporting! Carry on the superb works guys I

  3. Françoise M dit :

    J’aime et on retrouve ta verve au quotidien
    Merci

  4. Irène Fabry dit :

    toujours cette petite pointe, j’aime beaucoup

  5. Michèle Lého dit :

    J’attends la version papier. Bientôt ?

  6. favre janine dit :

    c’est vachement bien, humour noir ou rose ou ….en tout cas y’en a toujours et c’est çà qui est bien. En plus « c’est pas faux » ce que tu dis et bien écrit. Donc bravo

  7. escort lyon dit :

    Je vous ai suivi pendant toute une année: c’était génial (entre toutes mes corrections ça me remontait le moral!)! Bon retour! Catherine

  8. Michèle Lého dit :

    Cette nouvelle (Christine) ça m’a complètement replongée dans mon adolescence. Pareil !

  9. Irène Fabry dit :

    Merci encore, quel plaisir, continue on veut connaître la suite…

  10. thierry-didier Klein dit :

    Merci et bravo (Christine et les autres nouvelles ). Quelle belle écriture et quel plaisir de te lire .

  11. Matthieu dit :

    J’ai enfin lu ces textes, il était temps ! Et bien je ne suis pas déçu j’ai passé un joli moment : continue !

  12. Irène Fabry dit :

    J’adore ta « vie de chat », tes descriptions d’instruments, de vie tout simplement, c’est drôle et tellement juste, tendre aussi bises d’Irène

  13. Thierry Klein dit :

    Je me suis régalé a la lecture de « l’honneur de mon Grand-père  » BIZZZZZZzzzzzzzzzz !!!!! Thierry .

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